D4 – 07 – Dans le creuset alchimique

JOUR 8

 

 

Pourquoi faire appel à l’alchimie dans cette classe ?

Lorsque nous pensons à l’alchimie, nous pensons forcément aux alchimistes du moyen-âge… des hommes, seuls dans leur laboratoire, qui manipulent la matière pour la transformer.

Oui. L’alchimie est associée dans notre esprit, aux hommes.

Et pourtant, ce n’était pas ainsi à l’origine.

Dans le recueil des textes les plus anciens liés à l’alchimie, le Codex Marcianus, existe un texte égyptien sur des recettes alchimiques (voir Alchimie de M.L. Von Franz). Et c’est la Déesse Isis elle-même qui est la narratrice et la donatrice du grand secret.

Le texte explique qu’Isis repousse les tentatives d’union avec un ange en lui demandant de lui révéler les mystères. Et Isis obtient ce savoir mystérieux qu’elle révèle sous forme de recettes très typique de l’alchimie.

Il s’agirait d’un mythe d’accès à la connaissance totalement nouveau !

A la place de l’Eve coupable, nous avons Isis qui soutire le savoir aux anges, et les transmet.

La féminité d’Isis prend la main et cela n’étonnera aucun historien : le développement du culte isiaque s’est produit tardivement en Egypte. Isis remplaça peu à peu, les autre cultes solaires ! D’ailleurs, un autre mythe existe sur Isis qui soutire au Dieu Soleil son véritable nom (et le détenteur du nom de l’autre a le pouvoir sur lui…) La légende d’Isis-Râ correspondrai donc à une réalité historique.

Dans le mythe qui nous intéresse, Isis acquiert la connaissance du grand secret. Et de ce savoir nouveau qui n’était pas matérialisé, elle en crée l’alchimie et l’offre aux humains.

Le principe féminin n’est alors plus coupable du don de la connaissance. La  Déesse est au contraire, la bienfaitrice de toute l’humanité ! 

 

Qu’est-ce que l’alchimie ?

Si Isis est bien l’inventrice de l’alchimie, il reste tout de même à définir ce que cette science du passé est exactement et de comprendre, pourquoi elle a survécu de l’antiquité jusqu’au moyen-âge tardif. Pour cela, je laisse la place aux écrits de C. G. Jung :

L’esprit de l’alchimie était aux prises avec le problème de la matière, lorsque la conscience dans son exploration, se heurtait au monde obscur de l’inconnu dans lequel elle croyait percevoir des formes et des lois, qui, en fait, n’appartenaient pas à la matière mais à la psyché.

Cela signifie que les chercheurs alchimiques ont projetés leurs états d’âme dans leurs questionnements, devant l’inconnu.

La résolution de la matière par les sciences modernes a peu à peu scindé en 2 le travail de l’alchimie (chimie et philosophie) jusqu’à disparaître totalement de nos jours (ce qui n’est pas le cas du chamanisme qui a survécu dans les populations). Le coup de grâce fut en effet donné par le siècle des lumières, qui était tout à fait incompatible avec la recherche alchimique par l’obscurité.

Il est remarquable de noter que le processus alchimique ressemble énormément aux enseignements chamaniques. Ce qui est frappant est la correspondance de l’usage des éléments (terre, feu, etc…) et des couleurs de la roue de référence (rouge, jaune, noir, blanc). Ces deux “philosophies” s’expriment sur une recherche du sens de la vie à partir de la nature (un des livres d’alchimie s’intitule “Philosophia naturalis” ). La philosophie par la nature : voilà le grand point commun entre les mystiques européens et amérindiens !

On notera un bémol à cette magnifique image unitaire de ces deux cultures : l’eau et l’air n’appartiennent pas aux mêmes étapes. Pour l’alchimie, l’eau arrive dans la 2e phase. Dans le chamanisme, cela correspond à l’air.

Dans les deux cas, ces éléments sont utilisés pour le même processus : la purification.

Les amérindiens auront plutôt un réflexe de fumigation (sauge, tabac, …) et les européens du moyen-âge (en bons descendants de l’époque romaine et de ses thermes) associeront donc plus la purification avec l’élément eau (bains, ablutions). Nous verrons donc au moment approprié avec quel élément travailler dans ce cas particulier.

 

 

En fouillant l’inconnu en quête de vérité, les alchimistes ont donc établi un lien avec leur psyché profonde. C’est donc la toute première fois dans l’histoire de l’humanité, que l’inconscient n’était plus diabolisé et était même abordé de façon “scientifique” par des intellectuels raisonnés.

C’est aussi pourquoi l’alchimie reste tellement d’actualité : à cause de son universalité sur le sujet de l’inconscient.

Amener à conscientiser l’inconscient est exactement ce que cette classe souhaite activer !

Et si l’inconscient est souvent représenté par un océan, ou un dragon, c’est à cause de sa dangerosité apparente. Nous abordons le travail sur l’inconscient avec retenu, car nous avons peur de nous y noyer. De nous faire avaler.

Mais si nous nous y lançons comme pour une expédition guidée, à la recherche d’éléments précis, le dragon devient notre monture ! Dans l’imagerie chrétienne, nous nous souvenons bien de l’archange Michaël triomphant du dragon. Mais il y a aussi les représentations de Marie, les pieds sur le dragon, c’est à dire qu’en amenant sur cette bête fantasmagorique la lumière, nous en faisons un compagnon idéal.

La lumière est apporté par notre conscience. Notre égo doit donc être suffisamment fort pour entreprendre une telle quête ! C’est pourquoi il nous a fallut commencer par cette phase de solidification de l’ego dans la première part de notre vie (jusqu’à notre crise existentielle qui remet soudainement tout en cause !)

Comme les alchimistes, notre recherche dans l’inconnu se fera donc avec raisonnement.

 

Quatre

Tout comme l’initié Apulée qui ne retient que 4 facette des Déesses, chamanisme et alchimie fonctionnent toutes deux sur une base 4.

Et c’est en cherchant à interpréter mes toiles intuitives (comme Daphné, la femme arbre ci-dessus) que je me suis intéressée aux symbolismes alchimiques. “Pareillement”, Jung s’intéressait à ce domaine en cherchant à interpréter des contenus de rêves qu’aucune autre mythologie ne pouvait expliquer. Les rêveurs utilisaient beaucoup de symboles comme l’ouroboros, le dragon, le 4, le mandala… sans rien connaître de l’alchimie. Cela fut identique dans mon cas : des symboles ont surgi qui ne pouvait pas être expliqué par mes connaissances en alchimie (quasi nulles en 2015).

Si j’ai inséré ici un bref témoignage, c’est dans sa démonstration doublement intéressante :

1). L’alchimie et ses symboles peuvent donc encore surgir de notre psyché à notre époque moderne.

2). Nous exprimons des contenus de l’inconscient collectif de notre culture propre même si notre conscient n’en connaît rien ! Ce qui fait dire notamment à Jung, que l’inconscient collectif se divise lui-même en groupes : l’inconscient d’une même nation par exemple. Ainsi, bien que nous puissions être attiré par des cultures et mythologies exotiques, notre inconscient peut choisir d’en revenir à nos fondations culturelles européennes. Je trouve que ceci constitue une extraordinaire preuve de son autonomie.

Et de sa puissance.

 

Bibliographie

Psychologie et alchimie, C. G. Jung

Alchimie, Marie-Louise von Franz

 

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